Par Propos recueillis par Nicolas Gros-Verheyde, à Bruxelles
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Entretien avec le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, à la veille d’un sommet, à Pau, entre Emmanuel Macron et les chefs d’État de la région.

Les principaux dirigeants du Sahel (Mali, Burkina Faso, Niger, Tchad, Mauritanie) seront à Pau, demain, autour d’Emmanuel Macron, pour discuter de l’évolution de leur région. Invité également à ce sommet exceptionnel, le chef de la diplomatie européenne, l’Espagnol Josep Borrell, a accepté de répondre à nos questions.

« Sud Ouest Dimanche...

Les principaux dirigeants du Sahel (Mali, Burkina Faso, Niger, Tchad, Mauritanie) seront à Pau, demain, autour d’Emmanuel Macron, pour discuter de l’évolution de leur région. Invité également à ce sommet exceptionnel, le chef de la diplomatie européenne, l’Espagnol Josep Borrell, a accepté de répondre à nos questions.

« Sud Ouest Dimanche » Vous serez à Pau, demain, pour ce sommet sur le Sahel. Quel est votre message ?

Josep Borrell Je suis là pour dire une chose principale : le Sahel, c’est vraiment l’affaire de tous, et pas seulement de la France. Je l’avais dit aux Invalides, début décembre. Je le redirai à Pau : les soldats qui sont morts se battaient pour la sécurité de la France, pour la région, pour le continent africain mais aussi pour l’Europe.

Deuxièmement, il faut travailler ensemble, trouver une voie conjointe pour avancer nos efforts. Si nous nous permettons le luxe de nous diviser, ce sera exploité par ceux qui veulent détruire ces pays. Les conséquences seront dramatiques, pour les populations locales comme pour nous.

Troisièmement, le Sahel nécessite une mobilisation urgente et renforcée, ici et maintenant. C’est une priorité pour l’Union européenne.

Pourtant, dans cette région, tous les indicateurs semblent au rouge. L’État malien peine à gouverner. Les djihadistes sont loin d’être vaincus…

C’est vrai, on doit reconnaître que, malgré un engagement sans précédent, la situation ne s’améliore pas. Les attaques terroristes presque quotidiennes sont autant de rappels douloureux de la dégradation continue de la situation sécuritaire en Afrique et au Sahel. Et les victimes de ces attaques sont les plus vulnérables parmi les plus vulnérables. Je pense, par exemple, à ces enfants et instituteurs dont le bus scolaire a explosé, le week-end dernier, au Burkina Faso. Mais c’est justement pour cela que nous devons nous mobiliser davantage, tous.

Les Français ont pourtant parfois le sentiment d’être seuls au Sahel ?

Non, la France n’est pas seule. Au Sahel, l’Union européenne s’est engagée politiquement, humainement et financièrement. Dans des proportions sans précédent. Sur place, nous avons trois missions. L’une est militaire, elle forme et conseille l’armée malienne. Les deux autres sont civiles, elles conseillent et appuient les forces de sécurité intérieure (de la police et de la gendarmerie) au Niger et au Mali.

Nous avons été aussi les premiers à soutenir la création, en 2017, de la force du G5 Sahel. 115 millions d’euros ont servi concrètement, par exemple pour équiper cette force en véhicules blindés. Et je peux vous annoncer que nous continuerons : nous allons mobiliser 140 millions d’euros supplémentaires cette année.

Est-ce que cela suffit ?

Bien évidemment non. Car la réponse ne peut pas être uniquement sécuritaire ou militaire. La paix ne se gagne pas uniquement par les armes. Elle se gagne aussi par le retour des services de l’État dans les zones les plus fragiles, par l’apaisement des tensions communautaires, par la garantie à tous et à toutes des services de base comme la santé ou l’éducation. C’est une réponse globale que nous devons apporter.

C’est une vraie priorité, malgré tout ce qui se passe ailleurs dans le monde ?

Oui. Le Sahel et plus généralement l’Afrique sont très clairement une priorité de mon mandat et de la nouvelle Commission européenne, présidée par Ursula Von der Leyen. Une partie de l’avenir de l’Europe se joue en Afrique.

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